Il y a 50 ans, naissait l'Europe Spatiale (CECLES-ELDO et CERS-ESRO)
50 ans de coopération spatiale en Europe : Projets et réalisations
Différentes étapes de Spatial Européen
Cinquantenaire de l'Europe spatiale sur TF1
La monnaie de Paris a décidé de commémorer l'évènement en frappant des pièces de 50, 200 et 500 euro en or. elles représentent la fusée Ariane symbole de la coopération spatiale européenne sur le recto et la déesse Europa sur le verso.
D'après le Bulletin 158 de mai 2014 de l'ESA page 70-71
Cinquantenaire du Tir F-1 du premier étage d'Europa à Woomera 5 JUIN 1964
Le premier vol d'essai du premier étage d’Europa-1 (missile britannique Blue Streak F1), a eu lieu le 5 juin 1964 à Woomera, en Australie, marquant ainsi le début de la coopération spatiale européenne. La fusée Europa était un lanceur de satellites du CECLES-ELDO, qui était l'un des précurseurs de l'ESA et des lanceurs Ariane. Europa a été construit pour permettre l'accès de l'Europe à l'espace et pour mettre des satellites scientifiques européens en orbite. Cette tâche a été élargie par la suite aux satellites de télécommunications et météorologiques. Il était composé de trois étages (Blue Streak du Royaume-Uni, Coralie pour la France et Astris pour l’Allemagne). Le premier tir d’Europa complète et utilisant les trois étages actifs a eu lieu le 30 novembre 1968(tir F7). F1 a été le premier vol d'essai de la Phase 1 du programme de développement du lanceur du CECLES-ELDO, en lançant le premier étage d’Europa .Le premier étage F1 est arrivé à Adélaïde, en Australie, le 18 janvier 1964 puis a été transporté à Woomera pour les préparatifs de lancement. Il a été installé sur sa plateforme de lancement au mois de mars 1964 et a subi des tests de tir statique en avril. Le lancement était prévu pour le 25 mai, mais une météo instable à Woomera a causé des retards. Après plusieurs tentatives reportées de lancement, un autre tir a été fixé pour le 5 juin 1964. À l'aube du 5 juin, les conditions météorologiques étaient excellentes, et après un compte à rebours final extrêmement précis et sans heurt, le véhicule a décollé avec succès à 09:11. Il suivit un vol nominal, avec une trajectoire et un point d'impact qui se sont révélés identiques aux prévisions. Cependant, à environ 130 secondes après le décollage, les dossiers de télémétrie indiquent que le véhicule est devenu instable. Cela s’est aggravé à 140 secondes, en développant un tire-bouchon incontrôlé à 145 secondes. À 147,5 secondes, le moteur a cessé sa poussée, seulement six secondes avant l'heure prévue pour la coupure du moteur. La cause de cette fin de vol motorisé est due à une panne d'alimentation en carburant du fait des manœuvres du véhicule lors de sa dernière période d'instabilité. L'instabilité étant due au ballottement du carburant dans les réservoirs d'ergols. Bien que le véhicule se soit disloqué vers la fin du vol, le lancement a été considéré comme étant un succès. Les enregistrements de télémétrie et de poursuite radar ont été excellents. La bonne visibilité a permis d'obtenir des données sur le vol jusqu'à son point culminant, à environ 4 minutes, quand la débâcle a été observée. À l'exception de certaines pertes de couverture de la caméra au moment de la période de coupure du moteur en raison de la longue distance, les données obtenues par les instruments du centre de lancement de Woomera étaient excellentes, et les performances du véhicule étaient bien à la hauteur des attentes théoriques.
50 ans séparent ces deux clichés entre le décollage le 5 juin 1964 de Blue Streak à
Woomera et celui d'Ariane 5 emmenant l'ATV5 vers l'ISS le 29 juillet 2014 à Kourou
IL y a 50 ans
dans le numéro d’air et Cosmos N°2409
L’échec d’Europa par Gabrielle Carpel
En 1954, les britanniques commencent à réfléchir à Blue Streak, un missile balistique à courte portée mono étage. Quelques années plus tard au début des années 1960, le programme est annulé mais le concept est converti en étage de lanceur. Le programme Europa est né.
Europa est composé de 3 étages le premier étage Blue Streak est anglais, Coralie le second étage construit par la France et Astris le troisième étage est construit par les Allemands. La coiffe était quant à elle, Italienne.
Le 5 juin 1964, le premier tronçon de la future fusée vole pour la première fois depuis la base australienne de Woomera.
Quatre lancements du même type lui feront suite entre 1964 et 1966, tous des réussites. Mais si chaque morceau de la fusée fonctionne tout seul, les faire décoller tous ensemble est une autre histoire. Après quatre tentatives de satellisation ratées entre 1968 et 1971 le programme est définitivement abandonné en 1973.
L’échec du programme attribué au manque de coordination entre les pays décida tout de même l’Europe à agir différemment. Et en 1973, le tout nouveau lanceur de l’agence spatiale européenne est confié au CNES. Ariane était née.
Création du CECLES-ELDO
À la suite de l'exploit de Spoutnik en Octobre 1957, les Etats Européens réalisent qu'ils ont un retard considérable à rattraper sur l'Union Soviétique et les Etats-Unis d'Amérique en matière de lanceurs d'engins spatiaux. En 1958, un premier comité pour les recherches spatiales est crée (le COSPAR). Or, il se trouve en 1960 que la Grande Bretagne décide d'abandonner son missile nucléaire de portée intermédiaire BLUE STREAK et de continuer à le produire à des fins pacifiques. Elle propose de l'utiliser en tant que premier étage d'un futur lanceur Européen de satellites. La France, de son côté développe un programme spatial national dérivé de ses missiles militaires mais semble également intéressée(par l'intermédiaire du général de Gaulle) par le développement d'un lanceur lourd de satellites afin de contrer l'hégémonie des soviétiques et des américains en matière de fusées. Elle propose de fournir le deuxième étage du futur lanceur il s'agira de CORALIE pour Cora (Austra)lie. Après que les allemands décident de renouer avec le spatial après l'interdiction de l'après guerre, en fournissant le troisième étage, en septembre 1961, Le CECLES-ELDO (Commission européenne pour la mise au point et la construction d'engins spatiaux) est créée avec la répartition suivante des budgets attribués par chaque état:
La convention du CECLES-ELDO entrera en vigueur le 29 Février 1964 avec un premier lancement du premier étage d'Europa 1 le 5 juin 1964 à Woomera
Création du CNES en 1961
Alors que l'Union soviétique et les États-Unis ont entrepris la conquête de l'espace extra-terrestre, les États européens se sentent peu concernés par cette nouvelle frontière qui semble vouée uniquement à la science et qui paraît un gadget dans la compétition médiatique qui accompagne la Guerre froide.
Sans être beaucoup plus convaincu de l'avenir des applications spatiales, le gouvernement français du président Charles de Gaulle souhaite de pas laisser à l'URSS et aux États-Unis le monopole des techniques permettant d'atteindre la satellisation. Jusqu'alors, les recherches françaises entreprises dans le domaine des moteurs fusées ont été menées dans un cadre militaire à partir de technologies plus ou moins dérivées de l'expérience allemande des missiles V2. Dans le cadre de l'effort national en matière de recherche et de technologie, il est décidé de créer une entité civile qui consacrera ses activités à l'exploration scientifique et à l'utilisation de l'espace.
Le 23 Novembre 2005 :
conférence de l'association Planète sciences ( Planetastronomy.com) Jean pierre Martin
Raymond Orye :
Comment passe-t-on d'un lanceur (les spécialistes utilisent le mot lanceur plutôt que fusée) français à un lanceur européen?
Dès les années 1960 on crée deux organismes européens l'ELDO pour les lanceurs et l'ESRO pour les satellites, on pense déjà à une coopération européenne.
Les Anglais avaient déjà une licence de fabrication d'un étage de fusée américain (ATLAS) et c'est eux qui ont d'abord proposé de faire une fusée européenne basée sur leur expérience; le deuxième étage devait être français (Coralie) et le troisième allemand.
Ce fut le fameux projet Europa qui était tiré depuis Woomera en Australie.
Ce fut un désastre, pourquoi donc?
Manque de coordination et problème de management , chaque état finançait leur propre étage et c'était tout; bref comme le dit Mr Orye, on a appris ce qu'il ne fallait pas faire. Nous sommes début 1971 presque l'époque post-Apollo!
La volonté politique concernant Europa n'y était plus, et le CNES eut pour mission d'étudier (partiellement en secret) une solution alternative en 1972 qui aboutit au programme Ariane qui fut présenté au gouvernement puis aux futurs partenaires européens.
Jean Pierre Ledey (Président de l'Association Planètes sciences) rajoute :
Ce fut le projet secret 3 S du CNES qui était basé sur l'expérience d'Europa, le lanceur s'appelait au début L3S et a mené à la première Ariane.
Un nouvel organisme était crée en 1974, l'ESA l'agence spatiale européenne , il fusionnait l'ELDO et l'ESRO et la maîtrise d'œuvre était française (CNES) afin de tenir compte du manque de coordination des années précédents.
Ceci aboutit à un tir réussi le 24 Décembre 1979
Le pas de tir était celui de la dernière Europa : Kourou le CSG (Centre Spatial Guyanais).
Puis naquit la famille Ariane dont la principale caractéristique était la grande fiabilité (120 Ariane 4 dont seulement 3 échecs).
L'Ariane 4 a été arrêtée car elle ne correspondait plus au marché et on a développé Ariane 5 qui pouvait effectuer des lancements doubles de satellites très lourds.
Création du CERS-ESRO
le deuxième organisme spatial européen concernant la recherche et la technologie spatiale le CERS-ESRO est né des travaux menés par la Commission préparatoire européenne pour la recherche spatiale (la Copers). Sa mission était de réaliser des satellites scientifiques. La convention créant l’ESRO est signée le 14 juin 1962 par neuf états : l’Allemagne, la Belgique, l’Espagne, la France, l’Italie, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, la Suède et la Suisse. Quelques mois plus tard, le Danemark les rejoint. Le 23 mars 1964, la Convention entre en vigueur pour huit ans. Le CERS-ESRO accomplit sa tâche avec un certain succès. Entre 1968 et 1972, sept satellites furent mis sur orbite par des lanceurs américains. Contrairement au CECLES-ELDO, Le CERS-ESRO était doté d’une administration centrale et de centres techniques propres qui devaient ultérieurement constituer les fondements de l’Agence spatiale européenne. Celle-ci devait voir le jour en 1975 suite à la fusion de l’ESRO et de l’ELDO.
stand de l'ESRO au salon du Bourget en 1973
Klaus Iserland interview du 11 Mars 2003 par David Redon
Il faut quand même savoir que l’ESA est née de la fusion de l’ELDO et de l’ESRO. En réalité c’était 5% d’ELDO et 95% d’ESRO ; ce que l’on appelle un pâté d’alouette ! Une petite alouette et un gros veau ! Et ça très peu de gens le savent et ça explique pourtant beaucoup de choses…
DR : Comme quoi par exemple ?
KI : Le fait que l’ESA pendant – si je me souviens bien – les sept premières années n’avait pas de Directeur des Lanceurs du tout. Les lanceurs ça ne les intéressaient absolument plus. Il y avait même, pour le dire très franchement, une sorte d’aversion de l’ESRO envers le lanceur européen qui était en partie justifiée puisqu’ils se rendaient compte que si on réussissait, on les forcerait à lancer avec le lanceur européen et comme ils avaient moins confiance en la technique européenne qu’en la technique américaine ils ont préféré être sûrs de leur coup et lancer leurs satellites avec des lanceurs américains. Ça peut se comprendre puisqu’en fait cet état d’esprit a quand même duré dix ans entre l’ESRO et l’ELDO – années durant lesquelles l’ELDO a représenté un danger pour les lancements de satellite. En outre, l’ELDO appelait des fonds qui auraient pu être alloués à la recherche scientifique ; c’était perçu comme ça par l’ESRO. Il y avait donc non seulement peu d’intérêt et je dirais même une sorte de négation, enfin, d’aversion de l’ESRO envers l’ELDO… Cela explique que pendant sept ans, alors que l’ESA était censée être la succession de l’ELDO et de l’ESRO, il n’y ait pas eu de Directeur des Lanceurs.
50 ans de coopération spatiale ( Actualités)
Le 5 Février 2014
Le Groupe des parlementaires pour l'espace (GPE), a accueilli, mercredi 5 février 2014, Jean-Jacques DORDAIN, directeur général de l'Agence spatiale européenne (ESA).
En 1964, les ancêtres de l'ESA étaient mis en place : le Conseil européen de recherches spatiales (CERS-ESRO) ainsi que le Centre européen pour la construction de lanceurs d'engins spatiaux (CECLES). Un demi-siècle plus tard, l'ESA regroupe 20 Etats membres, en associe d'autres, et représente l'outil principal de la politique spatiale européenne. Son siège est à Paris.
Dans le contexte difficile auquel fait face l'industrie spatiale européenne, comme en témoignent les récentes annonces d'Airbus Defence & Space, les parlementaires ont fait part au directeur général de leurs préoccupations quant à l'avenir du secteur, notamment en ce qui concerne les Yvelines qui comptent les sites d'Elancourt et des Mureaux.
En 2014, l’Europe fête cinquante ans de coopération spatiale.
(ambassade de France en Autriche)
En effet, c’est en 1964 qu’ont été créés l’Organisation européenne pour la mise au point et la construction de lanceurs d’engins spatiaux (ELDO) et de l’Organisation européenne de recherches spatiales (ESRO), qui dix ans plus tard, donneront naissance à l’Agence spatiale européenne (ESA).
L’ESA coordonne les projets spatiaux menés en commun par une vingtaine de pays européens depuis 50 ans. C'est l'un des meilleurs exemples de collaboration scientifique et technologique à l'échelle européenne. Les technologies liées à l’Espace profitent à tous les citoyens : satellites d’observation de la Terre, de navigation, de télécommunication et d’astronomie. Par ailleurs, des sondes sont envoyées jusqu’aux confins du Système solaire et l’Europe mène en coopération des projets d’exploration humaine de l’espace.
L'odyssée européenne de l'espace a 50 ans
Dans cette édition de Space, nous revenons sur 50 ans d’exploration spatiale en Europe. Cinq décennies de découvertes, d’innovations mais aussi d’échecs et qui ont eu un profond impact sur notre perception de nous-même et de notre planète. L’historien John Krige nous donne sa vision de l’évolution du secteur. Les vétérans du domaine spatial racontent leurs expériences dans les missions majeures et les plus importants lancements.
Tout commence dans les années 1960, en plein cœur de la guerre froide. Spoutnik devient alors le premier satellite artificiel placé en orbite, puis Youri Gagarine, le premier homme à effectuer un vol spatial, le tout sur fond de compétition entre les Etats-Unis et l'Union soviétique. D'après l'historien John Krige de l'Institut de Technologie de Géorgie (Etats-Unis), "la rivalité entre les deux superpuissances était probablement à son comble à cette époque, en particulier pendant la crise des missiles à Cuba : j'étais jeune et je me suis dit alors que c'était la fin du monde et c'est ce que beaucoup ont pensé".
Le "langage de la science" a uni les Européens
C'est dans ce contexte de tension que deux physiciens européens, l'Italien Edoardo Amaldi et le Français Pierre Auger, se démarquent. Pour eux, les fusées et les satellites n'ont qu'un but : faire progresser la science. Vingt ans après la Seconde Guerre mondiale, "les pays européens en guerre se sont rassemblés", fait remarquer Roger-Maurice Bonnet, ancien directeur du programme scientifique de l'ESA. "Ils ont décidé d'utiliser un langage qui ne pouvait pas les faire se battre entre eux : le langage de la science", lance-t-il.
Sous la direction d'Edoardo Amaldi et de Pierre Auger, l'Europe se lance elle aussi dans l'aventure spatiale en fondant deux organisations : l'une pour les fusées, ELDO et l'autre pour la science, ESRO. C'est alors le temps des budgets limités, des déboires du lanceur Europa et des dissensions entre partenaires comme la Grande-Bretagne et la France. "À la fin des années 1960, [les différents partenaires] se sont dits qu'ils devaient vraiment commencer à fusionner les deux organisations", explique John Krige, "mais cela s'est fait par à-coups et en 1973, une réunion très tendue a abouti à un programme qui devait être la base de cette nouvelle organisation unique et qui affirmait que la recherche scientifique était un volet obligatoire : elle devenait obligatoire", précise-t-il, "non pas parce que les gens aimaient la science, mais précisément, parce qu'ils ne voulaient pas la financer !" Cette obligation de financer la recherche au sein de l'Agence spatiale européenne (ESA) a été considérée plus tard comme une réussite dans la mesure où elle a encouragé l'essor du secteur.
L'épopée de générations d'Ariane
Mais à cette époque, c'est la mise au point d'une fusée européenne qui capte toute l'attention. "Les Allemands étaient contre le développement d'Ariane, les Britanniques y étaient extrêmement hostiles et ce sont les Français qui ont dit : "on va le faire", raconte John Krige avant d'ajouter : "franchement, c'est grâce au gaullisme français et parce que les Français soupçonnaient les Etats-Unis d'avoir des arrière-pensées stratégiques qu'ils ont lancé les choses et c'est sans nul doute la plus grande réussite de l'effort spatial européen".
Ariane 1 prend son premier envol en 1979. Et même si elle a été conçue pour être utile au secteur émergent des télécommunications, elle embarque à son bord, des missions scientifiques.
L'un des moments marquants de l'époque, c'est le survol de la comète de Halley par la sonde Giotto en 1986. "Mon souvenir le plus vif", avoue Gerhard Schwehm, ancien manager des missions Cluster et Rosetta (ESA). "Il y avait beaucoup d'adrénaline cette nuit-là", se rappelle-t-il, "parce que la sonde devait fonctionner et elle a très bien fonctionné. Mais au plus près de la comète, l'engin a été heurté, a basculé et nous avons perdu le contact ; la communication a été rétablie vingt minutes plus tard", indique-t-il, "c'était formidable de voir que cela fonctionnait et d'avoir le sentiment avec les collègues et tous ceux qui se trouvaient à l'ESOC, de vivre un évènement vraiment énorme".
Le drame d'Ariane 5 et la réussite de Huygens
Mais dix ans plus tard - en 1996 -, le parcours spatial de l'Europe est brusquement stoppé. La nouvelle Ariane 5 s'arrache de son pas de tir pour la première fois. À son bord : les coûteux satellites scientifiques Cluster. Quarante secondes plus tard, elle explose dans les airs. "Je n'oublierai jamais cet instant où j'ai vu ces grands gaillards, les chefs de projet pleurer dans un petit hangar derrière le centre de contrôle de la fusée", confie Roger-Maurice Bonnet, ex-directeur du programme scientifique de l'ESA, "je me suis juré à ce moment-là que nous relancerions la mission Cluster, c'est que j'ai fait." Et la mission Cluster se poursuit encore aujourd'hui.
Autre jalon posé par l'ESA dans l'histoire scientifique : la mission Huygens menée en collaboration avec la NASA. C'est en 2005 que cette sonde du même nom se pose sur Titan, le satellite le plus important de Saturne. "Quand Huygens s'est posé sur Titan, c'était un résultat extraordinaire", s'enthousiasme Gerhard Schwehm avant de tempérer : "mais je dirais aussi que c'était très angoissant de l'amener là-bas". "C'est le plus lointain atterrissage fait par l'Homme dans toute son Histoire", fait remarquer Roger-Maurice Bonnet.
Financement et contreparties
Sur Terre, les avancées scientifiques ne peuvent échapper aux contingences politiques et l'argent est bien souvent, au cœur des tractations. Il faut noter que l'ESA a établi un principe de juste contrepartie : quand un pays donne des fonds, son secteur spatial engrange des contrats pour un montant équivalent. Ce qui ne va pas sans poser quelques difficultés. "Ce principe", précise l'historien John Krige, "a obligé les grands pays comme la France et l'Allemagne qui pourraient faire les choses plus rapidement, peut-être plus efficacement et pour moins d'argent, à construire d'importants consortiums dans lesquels ils doivent céder par exemple à un pays qui a financé 5 % d'un programme, 5 % des contrats high tech : c'est délicat à gérer", conclut-il.
Pourtant, cette gestion complexe a abouti à des résultats indéniables et continue de porter ses fruits : "aujourd'hui", souligne Gerhard Schwehm, "Mars Express est encore en cours, Vénus Express aussi et Rosetta est très proche de la comète". Pour Roger-Maurice Bonnet également, le succès est incontestable : "l'Europe de la science, c'est l'Europe qui marche et l'Europe de l'espace, c'est l'une des plus spectaculaires composantes de cette Europe qui marche".
le cinquantenaire de l'Europe Spatiale
(Jean Pierre Martin Planetastronomy.com )
1964-2014 : 50 ans au service de la coopération européenne et de l’innovation En 1964 entraient en vigueur les conventions portant création de l’Organisation européenne pour la mise au point et la construction de lanceurs d’engins spatiaux (ELDO) et de l’Organisation européenne de recherches spatiales (ESRO). Quelque dix ans plus tard, l’Agence spatiale européenne (ESA) était créée à partir de ces deux organisations. L’année 2014 sera consacrée à la préparation de l’avenir à la lumière de ces cinquante années de succès inégalés qui ont fait de l’ESA l’une des plus grandes agences spatiales au monde. La devise choisie « Au service de la coopération européenne et de l’innovation » vise à souligner à quel point l’ESA, avec l’aide des délégations nationales de ses 20 États membres, de l’industrie spatiale, de la communauté scientifique, et, plus récemment, de l’Union européenne, a su faire la différence. Le cinquantenaire de la coopération spatiale est une fête pour l’ensemble du secteur spatial en Europe, qui peut être fier de ses nombreuses réussites. Cet anniversaire montre que lorsque ses États membres poursuivent les mêmes objectifs ambitieux et unissent leurs forces, l’Europe est à la pointe du progrès et de l’innovation, elle s’ouvre alors à la croissance, dans l’intérêt de tous ses citoyens.
À propos de l’Agence spatiale européenne
L’Agence spatiale européenne (ESA) est la porte d’accès de l’Europe à l’espace.
L’ESA est une organisation intergouvernementale créée en 1975, dont la mission consiste à gérer le développement des capacités spatiales de l’Europe et à faire en sorte que les investissements dans l’espace bénéficient aux citoyens européens et du monde entier.
L’ESA compte vingt États membres : l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, le Danemark, l’Espagne, la Finlande, la France, la Grèce, l’Irlande, l’Italie, le Luxembourg, la Norvège, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal, la République tchèque, la Roumanie, le Royaume-Uni, la Suède et la Suisse. Dix-huit d’entre eux sont également membres de l’Union européenne (UE).
L’ESA a signé des accords de coopération avec huit autres États membres de l’UE. Le Canada participe à certains programmes de l’ESA au titre d’un accord de coopération.
L’ESA coopère également activement avec l’UE à la mise en œuvre des programmes Galileo et Copernicus.
En coordonnant les ressources financières et intellectuelles de ses membres, l’ESA peut entreprendre des programmes et des activités qui vont bien au-delà de ce que pourrait réaliser chacun de ces pays à titre individuel.
L’ESA développe les lanceurs, les satellites et les moyens au sol dont l’Europe a besoin pour jouer un rôle de premier plan sur la scène spatiale mondiale. Aujourd’hui, elle lance des satellites d’observation de la Terre, de navigation, de télécommunication et d’astronomie, elle envoie des sondes jusqu’aux confins du Système solaire et elle mène en coopération des projets d’exploration humaine de l’espace.
signature à Paris de la convention de l'ESA le 30 avril 1975
visite du Président Giscard d''Estaing au salon du Bourget dans le pavillon du CNES en Juin 1975 en compagnie de Maurice Levy Président du CNES
le tout nouveau président Giscard d’Estaing impose un moratoire sur le programme Ariane,
Les célébrations des 50 ans de l'Europe Spatiale ont démarré en Angleterre le 5 décembre 2013, afin de lancer le centre Européen pour les applications et télécommunications spatiales (ECSAT) qui aura son propre bâtiment sur le campus de Harwell en 2015. On voit ici le directeur de L'ESA, Jean Jacques Dordain présentant le ministre britannique de l'enseignement supérieur et de la science David Willetts qui tient le portrait du "fond diffus cosmologique" qui est la première lumière de l'univers émise 380000 ans après le big bang et découvert par le satellite européen Planck . Le bâtiment de l'ECSAT portera le nom du 1er directeur de l'ESA : Roy Gibson.
L’ESA pose la première pierre de son nouvel établissement au Royaume-Uni
5 décembre 2013
Les premières pierres du nouveau centre de l’ESA au Royaume-Uni ont été posées aujourd’hui, lors d’une cérémonie, par le Directeur général de l’Agence, Jean-Jacques Dordain, le ministre britannique de l’enseignement supérieur et de la science, David Willetts, et le premier Directeur général de l’ESA, Roy Gibson.
Après avoir placé une de ces pierres au sein d’une sculpture qui ornera la cour de l’établissement, Jean-Jacques Dordain a révélé que le premier bâtiment du Centre européen des applications spatiales et des télécommunications (ECSAT), dont la construction doit être achevée en 2015, portera le nom de Roy Gibson.
À cette occasion, il a annoncé que 2014 sera l’année du cinquantième anniversaire de la coopération spatiale européenne, qui sera célébré à travers divers grands événements dans tous les établissements de l’ESA, y compris le Siège et l’ECSAT, ainsi que dans les capitales de certains États membres.
« J’ai à mes côtés l’homme qui a dirigé l’ESA au tout début de son histoire, et devant moi la représentation symbolique d’un futur nouveau bâtiment de l’ESA. Le secteur spatial britannique existe depuis aussi longtemps que l’ESA, et il est juste que notre tout premier Directeur général ait été originaire du Royaume-Uni. L’ECSAT témoigne de la volonté britannique renouvelée d’utiliser l’espace comme moteur de la compétitivité et de la croissance, en particulier dans le cadre de l’ESA », a déclaré Jean-Jacques Dordain.
« En fêtant le 50e anniversaire de la naissance des deux agences qui ont conduit à la création de l’ESA, nous célébrons cinquante ans de coopération européenne dans le secteur spatial. Je me réjouis d’être ici aujourd’hui pour marquer cette étape importante », a-t-il ajouté.
Jean-Jacques Dordain a ensuite présenté à Roy Gibson la plaque du futur bâtiment portant son nom, ainsi qu’un calendrier retraçant les grands succès de l’ESA.
« Je suis très honoré de prendre part à cette cérémonie de l’ESA au Royaume-Uni. Cela a toujours été un grand plaisir pour moi d’observer l’évolution de l’Agence au fil des ans, et j’ai été particulièrement heureux ces derniers temps de voir que les liens entre le gouvernement britannique et l’ESA se sont resserrés », a répondu Roy Gibson.
Construction à très faibles émissions de CO2, le bâtiment Roy Gibson comprendra une partie ouverte au public, mettant en évidence l’esprit d’ouverture et de coopération qui caractérise son positionnement sur le campus. Ces deux particularités en feront un bâtiment unique en son genre au Royaume-Uni comme au sein de l’ESA.
« À l’heure où le Royaume-Uni joue un rôle de plus en plus important au sein de l’Agence spatiale européenne, ce nouveau centre témoigne de notre volonté de resserrer les liens avec l’ESA. Je suis convaincu qu’il permettra à notre pays de tirer le meilleur parti possible du potentiel que représente le secteur spatial pour la croissance économique, et de rester à la pointe de la recherche scientifique à l’échelle mondiale », a ajouté le ministre David Willetts.
magazine Latitude 5 N°105 octobre 2014
1966, une année charnière pour l'Europe spatiale
12 juillet 2016
Frédéric Bourquin
voir article sur le blog suivant:
http:/www.maison-europe-nimes.eu/#!1966-UNE-ANNEE-CHARNIERE-POUR-L%E2%80%99EUROPE-SPATIALE/c5iu6/5784a27c0cf2273c5a761999
Place de l'Europe: actuellement parmi les puissances Spatiales, la chine et l'Europe concurrencent les deux grands la Russie et les états unis
Evolutivité des lanceurs européens par rapport à SpaceX
missions de l'Europe Spatiale en 2015
le passage au CECLES-ELDO du Général Aubinière interviewé par André Lebeau du CNES en janvier 2001 (livre publié en 2008 aux éditions L'Harmattan)
Général Robert Aubinière (1912-5 décembre 2001) André Lebeau
2éme secrétaire du CECLES-ELDO de 1972 à 1973
André Lebeau: j'aurais aimé qu'on aborde parce c'est intéressant, votre passage du CNES à L'ELDO. La façon dont vous êtes arrivé à l'ELDO; la situation que vous avez trouvée; les mesures que vous avez prises; Je sais que ce n'est pas un épisode très agréable mais...
Général Aubinière : Pourquoi, si! Non, non, je n'ai pas de regrets.
AL: Vous avez hérité d'une situation....
GA: Ce sont des situations que j'aime. Non, non, je me suis bien plu moi à L'ELDO, et je crois qu'ELDO aurait très bien fonctionné. Au fond , ce que je crois moi, c'est les Allemands étaient hostiles, avaient très peur de leur échec et ils avaient l'impression qu'ils n'étaient pas capables de faire leur troisième étage et de le réussir, et le ministre de l'époque, qui était d'ailleurs un socialiste dans un gouvernement Schmidt, était je crois décidé à tuer le programme; du côté français c'était le maire de Brive.
AL: Charbonnel ?
GA: Charbonnel, oui, qui était là, je ne le connais pas assez, vous le connaissez mieux que moi; je l'ai tenu au courant le mieux possible de ce qui se passait et l'impression que j'avais, était que vraiment les Allemands n'en voulait plus. Du côté du CNES, vous le savez, le CNES n'était pas très chaud non plus, et avait un programme qu'il estimait pouvoir faire....
AL: Je pense que ça, il faut vraiment qu'on en parle de façon approfondie, mais il y a une question qui m'intéresse, c'est la suivante: globalement dans l'histoire de L'ELDO, effectivement les Allemands n'ont pas très bien réussi, mais les Allemands partaient de zéro en matière de propulsion.
GA: oui.
AL: Ils avaient un passé naturellement, mais le passé avait quelque peu émigré aux Etats-Unis et ils étaient à zéro depuis la fin de la seconde guerre mondiale parce qu'ils avaient interdiction par le traité de Paris de travailler là dessus. Est-ce qu'à votre avis, le fait que L'ELDO a offert un moyen de contourner les interdictions du traité de Paris à l'Allemagne, c'est à dire sur les fusées, les lanceurs etc... ça a joué un rôle dans la position Allemande?
GA : Un rôle pour quoi ?
AL : Pour que les Allemands y adhérent.
GA : ça, c'est sûr que les Allemands n'avaient qu'une chose en vue, c'est acquérir la technique; ils se moquaient complétement de L'ELDO. Et c'est pour cela qu'ils voulaient toujours faire des lanceurs extrêmement compliqués, extrêmement avancés, parce que ce qu'ils voulaient , c'est de la technique et être forts en techniques avancées. Ce qui les intéressait, c'est la technique et la technologie. ça ne les intéressait pas de dire; je vais lancer des satellites. Vous voyez ce que je veux dire.
AL: Oui ,mais leur seul moyen de faire de la technique, c'était un accord international.
GA : Absolument; C'est grâce à cet accord international, qu'ils en faisaient mais, alors que nous, ce qu'on voulait, c'était lancer Symphonie. Eux, ils s'en foutaient complétement.
AL: C'est une dimension qui a été toujours présente dans nos relations avec les Allemands, je crois , leur désir de faire des techniques avancées. Je ne sais pas si vous vous rappelez, que du temps de Peyrefitte, les Allemands, Siemens en l'occurrence, nous avaient proposé d'étudier conjointement un réacteur nucléaire embarqué sur satellite; alors on avait regardé et on avait dit: eh bien on ne voit pas très bien à quoi ça pourrait servir dans un avenir prévisible. Les très gros satellites ne sont pas encore à l'horizon. Et Peyrefitte nous avait dit "Ecoutez si les Allemands ont envie de le faire ,il y a certainement de bonnes raisons; essayer de les faire s'expliquer" On avait demandé aux Allemands : pourquoi, Et ils avaient dit essentiellement: "C'est pour faire de la technique, faisons de la technique et on verra après"
GA : dans le livre de Laurent Schwartz, il y a des choses très intéressantes: il explique qu'au moment de l'arrivée d'Hitler ,tous les scientifiques et les techniciens Allemands sont partis et alors que l'Allemagne était la grande nation technique au monde, ensuite c'est devenu les Etats-Unis.
AL: C'était la première communauté scientifique du monde ; ils ont éliminé tous leurs savants juifs...
GA: Juifs et non juifs si bien que la puissance technique des Etats-Unis vient de là. ça vous le trouvez encore très nettement dans L'ELDO. Par exemple Europa 3 pour eux, ils se foutaient complètement que Europa 3 fonctionne; ce qu'ils voulaient c'est apprendre l'oxygène-hydrogène . C'est tout à fait intéressant , ce sont deux notions très différentes; alors que nous on voyait un lanceur pour lancer, un moyen quoi.
AL: Je vous propose qu'on reprenne la fin de votre période au CNES, quand vous étiez président du conseil de L'ELDO et votre transition vers l'ELDO.
GA: Le président du conseil de L'ELDO n'a pas un rôle considérable. Son rôle consiste simplement à orienter les débats du conseil lui-même, mais bien entendu ça ne donne pas d'autorité sur les membres du conseil; Je dois dire que pendant toute cette période ( ça vous paraîtra peut-être extraordinaire à cause de ce qui a suivi) mais durant toute cette période j'ai passé mon temps en tant que CNES à dire au ministre qu'il fallait quitter L'ELDO et que l'organisation telle qu'elle fonctionnait allait dans le mur et qu'on arriverait pas à faire...d'abord le lanceur n'avait aucun intérêt; ensuite quand on a modifié la nature du lanceur en mettant un quatrième étage, ce qui évidemment lui permettait de lancer des satellites de télécommunications, je pensais que l'organisation telle qu'elle était conçue ne pouvait pas manager un lanceur et qu'elle allait dans le mur. En fait c'est ce qui est arrivé, et alors j'ai toujours été renvoyé sur mes buts par tous les ministres. Les ministres m'ont toujours dit; il y en a même un qui m'a traité d'Israélien en disant : " vous avez une mentalité d'Israélien parce que vous voulez toujours redresser les choses alors que ça va très bien comme ça". Donc, j'ai toujours été opposé à l'organisation telle qu'était celle de L'ELDO.
AL: En quoi c'est Israélien de vouloir.....?
GA: Eh bien, je ne sais pas parce c'était à l'époque de la guerre des six jours; c'était au moment où le gouvernement français n'était pas très favorable à la politique israélienne et trouvait que la position israélienne n'était pas la bonne ? je dis ça pour dire quelque chose; ça n'a pas grand intérêt.
Quoiqu'il en soit, quelle était la cause fondamentale au fond de l'échec de L'ELDO ? La cause fondamentale, c'est que chaque état était patron de sa responsabilité, mais L'ELDO ne jouait pas son rôle de coordinateur, de manager qu'elle aurait dû jouer: elle n'avait pas l'autorité; elle n'avait pas cette autorité, d'abord parce que je pense que le secrétaire général de l'époque n'en était pas capable, c'était un ambassadeur; il n'était pas appelé à faire ça; il avait l'art des compromis, ce qui n'est pas du tout ce qu'il faut pour faire un lanceur. Il ne faut pas de compromis, il faut des décisions. Et d'autre part, les Etats eux-mêmes étaient opposés à l'autorité de L'ELDO. ça, je crois que c'est très très important parce que c'est ça qui est au fond...il y a une très grande responsabilité des Etats; Les Etats ne pouvaient pas imaginer que L'ELDO leur donne des ordres. on retrouvera d'ailleurs le même phénomène dans L'ESRO; par exemple comment choisissait-on l'industriel qui devait réaliser un satellite ou une portion de satellite? Chaque état défendait la position qui lui était le plus favorable. Ils ne s'occupaient du résultat; ils ne s'occupaient pas de savoir si c'était une bonne proposition ou une mauvaise proposition; ce qui était important c'était de savoir si c'était 30% ou 40% qui revenaient à l'industrie nationale ou non. Et ça c'était tout à fait frappant: Bignier en a une partie de responsabilité d'ailleurs et nous tous...
AL : Pourquoi en tant que représentant français....?
GA : En tant que représentant français quand il était lui ...là je parle surtout de L'ESRO parce que L'ELDO c'était joué, tandis qu'à L'ESRO, c'était fonction des satellites qui se faisaient.C'était très frappant; de telle sorte que, si vous voulez, le fait que les Etats ne voulaient pas d'une responsabilité de l'organisation a fait que ça n'a pas pu fonctionner. je fais un bon vers la fin, vers Europa 3 ( donc tout à fait à la fin) je ne pouvais pas obtenir que L'ELDO soit le patron d'Europa 3; c'étaient les Etats qui voulaient l'être et ils voulaient aussi que les industriels jouent leur rôle alors que, quand on a fait Ariane, les mêmes personnes, puisque Sillard se retrouvait là, ont traité à forfait avec les industriels sans problème. Bien entendu, la technique n'est pas la même et on pourrait discuter; mais enfin il y a un changement d'état d'esprit. Le CNES , responsable d'Ariane, avait le pouvoir et même était félicité parce qu'il était le patron; il traitait à forfait avec les Allemands, avec les Suédois pour le calculateur etc...tandis que c'était interdit à L'ELDO. Il y a donc là , à mon avis, une responsabilité des Etats qui est très grande dans la chute, dans les échecs de L'ELDO. Alors sur ce, il faut dire aussi que le premier étage ( je ne parle pas d'un point de vue technique de savoir s'il fallait faire ce lanceur -là ou ne pas le faire, j'admets que c'était ce lanceur qu'on voulait faire) le premier étage a très bien fonctionné; tous les tirs ont bien marché, les anglais ont montré qu'ils étaient bons. C'est à partir du deuxième étage français que ça commencé à aller mal avec l'échec du deuxième étage sous la responsabilité de la Direction des engins. A ce moment -là, le CNES décide de reprendre la responsabilité et de confier le management à une autorité ferme qui était la SEREB et à partir de là le deuxième étage a bien fonctionné et le système premier étage-deuxième étage a été satisfaisant. Le dernier échec, qui a été très important a été celui du troisième étage et de l'ouverture des coiffes; ça il est certain que du côté Allemand l'autorité n'existait pas, les industriels étaient complètement les patrons et ils voyaient dans L'ELDO une vache à lait; ils voyaient dans L'ELDO un moyen de gagner de l'argent mais ils se fichaient complètement des résultats. Pendant deux ans, j'ai été président de ce Conseil. C'était quand ?
AL : C'était dans les deux années qui ont précédé votre départ du CNES, je suppose.
GA: Il y eu un président entre temps qui était Allemand , je crois ou un Hollandais. Ensuite , en 1971 , pourquoi ai-je quitté le CNES et pourquoi suis-je allé à L'ELDO ? on peut se le demander après ce que je viens de dire; on peut se dire : c'était complètement idiot ; D'abord je voulais m'arrêter à 60 ans; j'ai des idées fermes sur la vie , on ne vit qu'une fois et j'estimais qu'à soixante ans, ça suffisait . Donc je voulais m'arrêter à 60ans et puis le problème de Symphonie s'est posé.
Le problème de Symphonie provenait du fait que la politique américaine ne pouvait envoyer de satellite qu'à condition qu'il soit expérimental. (vous savez ça beaucoup mieux que moi) Eh bien comme nous voulions nous que Symphonie soit un satellite réel, un satellite opérationnel, il fallait le lancer avec un lanceur non américain. Ca ne pouvait être que l'ELDO, donc comme je tenais beaucoup à Symphonie, parce j'ai participé à Symphonie, et puis c'est énervant quand même de savoir qu'on ne peut pas faire ce qu'on veut de son satellite, je me suis dit: Il faut que l'ELDO continue, réussisse, pour faire le satellite. A ce moment là, le secrétaire de l'ELDO s'en allait, prenait sa retraite . Carrobio s'en allait. Je me suis dit: je vais prendre la chose et je vais essayer. J'essayais depuis deux ans d'ailleurs de dire à Carrobio qu'il fallait modifier l'organisation; mais il n'y arrivait pas; il ne voulait pas le faire d'ailleurs; ce n'était pas du tout ses idées. L'ELDO à ce moment là était réduite à trois états: L'Allemagne , la France , et la Belgique pratiquement. J'ai été nommé secrétaire général: Le directeur technique a été nommé : C'était Hoffman, un Allemand et les Belges ont désigné le directeur administratif qui était Van Reeth. Les trois états étaient représentés et on formait une trinité. J'ai obtenu que - il y avait deux programmes, le programme Europa 2 et le programme Europa 3 qui étaient prévus- J'ai mis un Français à la tête des deux programmes: Le premier ça été Chauvallon - Il a été patron de Cannes après- Chauvallon qui était un ingénieur de Sud Aviation que j'ai pu avoir après la SEREB et puis Sillard que je connaissais depuis très longtemps et qui lui est venu pour Europa 3. J'avais été chargé par l'ELDO de faire un rapport sur la situation d'Europa 2 à la suite du dernier échec d'Europa qui avait eu lieu à Kourou. (J'étais au CNES encore) J'avais été chargé de faire un rapport sur ce qu'il fallait faire pour qu'Europa 2 marche. J'ai demandé un ingénieur Allemand pour m'aider et Sillard et à tous les trois on a fait une étude très approfondie de tous les éléments du lanceur et on a fait un rapport dans lequel on disait: Europa 2 peut marcher à condition d'avoir une politique ferme, un management ferme et en particulier d'être beaucoup plus rigoureux sur les tests, sur tous les essais qu'il y avait à faire. Et alors ensuite suivant ma méthode un peu brutale, j'ai vidé un certain nombre de gens qui étaient insuffisants, qui me paraissaient insuffisants et qui n'avaient pas un intérêt énorme et on a mis à leur place un certain nombre de gens qui étaient très efficaces.
AL: Vous avez vidé une fraction importante du personnel de l'ELDO ?
GA: Je le crains, oui. J'ai vidé beaucoup de gens parce que l'ELDO était incontestablement un moyen pour les états de faire une fin de carrière à leur agents. Alors vous aviez des gens âgés; Il y avait beaucoup d'Anglais qui étaient là, qui étaient en âge de prendre leur retraite; il y avait des Français aussi, des Allemands et tout ça, on a vidé, je ne sais pas , mais enfin on a bien vidé trente pour cent du personnel. Et surtout on a réorganisé complétement l'ELDO, le siège. C'est à dire qu'il y a eu un patron d'Europa 2, un patron d'Europa 3; j'en ai parlé. Chauvallon et Sillard. Alors ne parlons que d'Europa 2 qui est le plus important; dans mon esprit je ne faisais qu'Europa 2, et après je serai parti, je voulais faire Europa 2. Il y a eu un patron du premier étage, deuxième étage, troisième étage, quatrième étage, etc. et tout ça coordonné par Chauvallon qui en était le patron. Je suis allé voir tous les industriels responsables dans tous les pays (Angleterre, Allemagne) et je leur ai expliqué la méthode qui allait être une méthode beaucoup plus ferme; et qu'ils ne me parlent pas toujours d'argent ( parce qu'ils parlaient toujours d'argent et ça m'énervait) en leur disant que la première chose à faire c'était de réaliser. et on a fait un nombre d'essais énorme. On s'est aperçu que le troisième étage Allemand avait besoin d'être refait totalement et qu'il était vraiment dans une situation mauvaise. On a eu beaucoup de mal à trouver le calculateur Anglais; il n'y en a eu que deux après les essais, qui étaient valables, qui marchaient. Heureusement qu'il n'y a pas eu de tirs! Et j'avais demandé l'aide d'ingénieurs américains. Il y a eu des ingénieurs américains qui sont venus pour nous aider à mettre en œuvre et eux m'avaient dit ( c'était tout à fait mon avis) que la grande erreur qu'avait faite l'ELDO, avant qu'eux arrivent, c'était de vouloir tenir les délais. tenir les délais , évidemment c'est très bien mais on ne peut pas tenir les délais à n'importe quel prix. Nous on était obligé de dire qu'on retardait le tir; c'était au moment des élections françaises. C'était au moment où je crois, Giscard allait devenir Président. On a dû retarder le tir qui était prévu. A ce moment là , il y a eu un changement dans le gouvernement Allemand et le gouvernement allemand était décidé à abandonner Europa 2 et Europa 3 : il voulait tout supprimer et il voulait ... la politique allemande était de s'associer avec les américains et de participer à ce qui allait être la Navette Et faire le container, vous savez...
AL: Spacelab
GA: C'était la politique allemande, j'ai essayé de défendre la position qu'on devait pouvoir tirer nos deux lanceurs; on devait pouvoir les faire marcher, peut être pas en octobre mais en novembre ou en décembre; je n'ai pas été suivi; les allemands ont gagné ; le gouvernement français a accepté la position allemande et en plus il prévoyait un lanceur que vous connaissez mieux que moi, Ariane pour remplacer Europa 3.
AL: Il n'y a pas eu de tirs sous votre secrétariat ?
GA : Non pas du tout. On n'a pas tiré une fois. Le dernier tir a été fait avec Carrobio et c'est le dernier tir qui a tout déclenché... l'effondrement. Voilà je crois, ce qu'on peut dire. Il est plus facile, toujours, de prévoir le passé que l'avenir. Ariane est un succès et c'est très bien, ce qui s'est passé au fond; d'ailleurs beaucoup de gens qui l'ont fait, étaient à l'ELDO. Sillard, D'Allest, on les retrouve donc l'ELDO a quand servi un petit peu à quelque chose.
AL: Où était d'Allest à l'ELDO?
GA : Il s'occupait du deuxième étage d'Europa 3
AL : Je crois que l'analyse française ( je ne sais pas ce que vous en pensez) mais autant que je l'ai bien comprise; Il y a eu trois éléments dans l'analyse française le 1er : c'est, Les Allemands vont lâcher et on ne peut pas faire un lanceur européen avec la Belgique et la France.
GA : D'abord je crois qu'en réalité les Allemands n'avaient pas confiance dans leurs industriels: ils s'étaient dit qu'ils allaient échouer et que ça allait être de leur faute.
AL: 2éme point de l'analyse : On ne peut pas confirmer Europa 2 parce que ce n'est pas un bon lanceur et troisièmement : Europa 3, il y a de bons éléments dans la conception mais le deuxième étage est trop ambitieux et on va se casser la gueule. Donc il faut tirer un peu plus court et... c'était réaliste, je crois.
GA: Oui, absolument ça m'a appris quelque chose (au début je n'étais pas content) mais techniquement, il ne faut pas essayer de faire des choses trop violentes, trop rapides, et il n'y a pas de doute que Ariane correspondait à ce qu'on était capable de faire. Et ça, c'est très intéressant parce que, en fait, pendant que les américains se perdaient dans leur Navette et y dépensaient des sommes énormes, Ariane conquérait le marché.
AL: Ariane a repris les éléments d'Europa 3, c'est à dire le premier étage d'Europa 3
GA: Le premier étage d'Europa 3 et aussi le pas de tir.
AL: le pas de tir d'Europa 2 qu'on retaillé au moins pour un temps.
GA : C'est ça. Il est évident que l'ELDO n'a pas été quelque chose de complètement perdu mais on aurait pu faire tout de même pour moins cher et plus rapidement.
AL: Je crois que ça été une très dure leçon pour les Européens qui ont compris que ce n'était pas comme cela qu'il fallait faire.
GA: Absolument. C'est sur; je m'étais dit: Il faut quand même arriver à lancer ce truc là maintenant qu'on dépensé autant d'argent; mais c'est un reflexe de gamin , je le reconnais.
AL : Il aurait fallu vider Carrobio beaucoup plus tôt.
GA: ça, je le crois. Je l'avais toujours dit: ce n'est pas que je voulais sa place.
AL: Mais pourquoi l'a-t-on gardé si longtemps?
GA: Oh bien ça... vous savez c'est difficile de vider quelqu'un comme ça. Remarquer que Carrobio était un type intelligent, mais il n'était pas fait pour ce métier-là .C'était un diplomate , pas du tout un patron.
le 1er Secrétaire du CECLES-ELDO Renzo Di Carrobio en compagnie du Général Aubinière à droite, alors directeur du CNES, le 8 Mai 1970 ( visite de la station de poursuite de Honeysuckle en Australie )
AL: Je ne sais pas ce qu'il avait fait avant?
GA: Il était ambassadeur en Amérique Latine. Il parlait le français, il parlait l'anglais et l'allemand très bien, trois langues.
AL: ça procédait d'une conception où l'état major de l'ELDO n'avait pas de rôle technique et laissait les ...
GA: Je trouve qu'il n'était pas bon: L'état major que j'ai trouvé était mauvais, ne correspondait pas à ma conception. Par exemple le directeur technique qui était anglais, était un type qui n'était pas mauvais, qui était intelligent, mais qui n'avait pas la poigne. Il avait quand même l'idée de conserver sa place et de ne pas vexer les états. Alors, ça, ce n'est pas possible. Je vais vous raconter une anecdote. Il y avait un Italien qui avait été affecté juste avant que j'arrive, un ingénieur Italien, peut-être deux ou trois jours avant mon arrivée. Il était arrivé et, aussitôt arrivé, il était parti au ski. Alors qu'il y avait un délai d'un mois pour l'essayer, lui pendant quinze jours, il faisait du ski. Quand il est revenu, je lui ai dit: " écoutez, je suis désolé, retournez- y, n'hésitez pas " J'ai eu une pression continue de tout de ce qui était italien dans le monde : On m'a téléphoné en me disant " Ecoutez vous ne pouvez pas faire ça, c'est un type formidable " On imagine Carrobio là dedans c'aurait été....
AL: Alors on est arrivé vers la fin de l'ELDO. comment est-ce que cela s'est passé?
GA: La fin de l'ELDO. Ca s'est passé très honorablement; je me rappelle même la dernière séance où j'ai dit:" Voilà , vous avez décidé d'arrêter l'ELDO" Ils avaient d'ailleurs déjà décidé d'arrêter Europa 3; C'est Europa 2 qui restait encore. donc c'est à la dernière séance qu'on a coupé europa2 et j'ai dit:" Moi, je ne peux que m'incliner devant ça; C'est une décision de votre conseil. Il est bien entendu que nous ferons tout ce que nous pouvons pour que ça aille le plus vite possible; c'est à dire que nous vendrons tous les biens, tout ce qui appartient à l'ELDO, tout ce qu'on peut en récupérer et on va dissoudre très rapidement de manière à ne pas trainer. Ce que je me demande simplement c'est que vous fassiez des conditions honorables au personnel qui lui va se trouver à la rue" ça les gens ont très bien compris; ils ont été payés pendant deux ou trois ans ou à peu près... sauf quand ils retrouvaient du travail bien entendu; ça a été très honorable. Beaucoup ont retrouvé du travail, mais il y en avait quand même, en particulier des types plus âgés qui ont eu du mal à en retrouver.
AL : Sillard et d'Allest ont retrouvé du travail tout de suite ?
GA : Oh, Sillard et d'Allest, il n'y eu aucun problème. Sillard, c'était amusant parce que Bignier était à ce moment là le patron du CNES, et il était venu me trouver: Il m'avait dit "J'ai l'intention...il faut que je trouve quelqu'un pour manager Europa 3....Ariane; qu'est-ce que vous me conseillez" . Je lui ai dit " Moi, si j'ai un conseil à vous donner, si j'étais vous, je prendrais Sillard; j'avais la responsabilité de Sillard et Sillard est libre donc... et Sillard n'a démérité en aucune façon". Il m'a dit "oui, mais je n'aime pas beaucoup Sillard; je préférerais Bigot" Je lui ai dit" Bigot est très bien aussi mais moi, entre Bigot et Sillard, je préfère Sillard...au point de vue technique" Alors il a choisit Bigot; C'est Bigot qui lui a refusé parce que Bigot voulait rester à Air Inter; Et alors il a pris Sillard après; Sillard m'a toujours dit :" Il m'a pris par défaut", mais enfin il était très content.
AL: Il craignait un peu la poigne de Sillard ?
GA : Je ne sais pas . Il avait ses idées. Mais il était très ami avec Bigot.
AL : Bigot est plus rond que Sillard...
GA : Mais il est très bien aussi vous savez. Ils auraient été très bons tous les deux
Sillard a manœuvré ça remarquablement. Il a fait tout plus ou moins à forfait et il faut le faire. C'est bien, non, c'est bien ce qu'a fait...
AL : Oui et puis il a pris des risques dans la gestion financière très habilement, mais tout de même vraiment très courageusement...
GA : Alors il s'est appuyé; Il a eu D'allest qui est un bon technicien; il a eu une bonne équipe quoi. C'est très bien.
AL : Ce qui est amusant, peu de temps avant qu'il ne vienne au CNES, j'avais eu communication d'une note de Sillard expliquant que L3S ( ça s'appelait comme ça à l'époque) ne serait jamais un bon lanceur.
GA: Oui, oui; mais ça c'est normal, oui, oui c'est normal, il avait la responsabilité d'Europa 3.
AL: Quand j'étais à l'ESA, j'avais un jour été pris à parti dans un couloir par Curien et Sillard qui me reprochait de ne pas avoir suffisamment soutenu la position...
GA: Curien alors Président...
AL : président du CNES ... de ne pas avoir soutenu la position du CNES sur je ne sais quel aspect de la politique "lanceurs ". j'ai commencé à m'expliquer et au bout d'un moment j'ai dit :"écoutez, je trouve tout de même extraordinaire que vous m'attaquiez sur ce sujet parce que de nous trois; je suis le seul qui n'est jamais été opposé à Ariane."
GA: Non seulement pas opposé, mais vous êtes l'initiateur.
AL: Eh , alors Sillard a eu cette réponse délicieuse" Oh oui, mais moi, ça n'a pas duré longtemps"
GA: je dois dire que moi, je trouvais aussi que ça n'était pas très avancé au point de vue technique. Et c'est une erreur que je commettais; je me disais: quand même décider ça maintenant on est vraiment très en dessous; En réalité ce n'est pas vrai.
AL : C'est l'équipe "lanceurs" qui avait fait l'analyse: voilà si on prend cette définition, on n'aura pas de problème technique majeur, on n'aura que des problèmes mineurs et ça nous suffira bien.
GA: Le lanceur Ariane avec l'actuel champ de tir de Guyane, c'est quand même un truc extraordinairement brillant. Il faut dire que je n'y suis pour rien...Non ,non j'ai eu un petit truc mais tout le monde a eu un petit truc... La dernière fois que je suis allé voir tirer Ariane 5, j'ai été assez bluffé par le champ de tir. J'ai cru comprendre que maintenant ils avaient fait de nouveaux bâtiments qui sont absolument extraordinaires. C'est vraiment un champ de tir extraordinaire. je ne parle pas au point de vue même de l'emplacement: il est bien placé mais tout l'ensemble du système, le personnel, l'organisation et ça , plus le lanceur, c'est quand même un succès énorme.
AL: Oui et puis c'est une opération maintenant où cohabitent des Européens, des Italiens, des Allemands...
GA: Il y a des gens de tous les pays et des clients de tous les pays et de toutes les couleurs même.
AL: comment avez vous quitté l'ELDO vous -même?
GA: Oh bien, pendant un an j'ai été le secrétaire général de l'ensemble ELDO-ESRO. Il y avait une réunion et j'étais secrétaire général. J'étais par exemple ,le secrétaire quand il y a eu la décision d'Ariane à Bruxelles, j'étais le secrétaire.
AL: La décision de créer une agence unique ?
GA : Mais je n'y suis pour rien...
AL: Ce qui était curieusement l'idée d'Heseltine
GA: Oui, absolument d'Heseltine. Mais Heseltine avait des idées tout à fait originales et qu'on aurait dû suivre . Le gouvernement français a eu tort à mon avis de ne pas le prendre au mot; il fallait le prendre de vitesse, à mon avis, parce qu'il émettait des idées qui étaient contraires à son gouvernement. Donc il fallait le prendre, le surprendre.
AL: Jean Charbonnel ne l'aimait pas; on ne pouvait pas les faire parler ensemble. Quand les anglais ont décidé de participer à Ariane par le biais d'une convention bilatérale avec la France (Ils voulaient une Agence Spatiale Européenne unique et ils coopéraient en bilatéral avec la France sur Ariane) et qu'il a fallu voir ce qu'ils pouvaient faire, ça s'est passé à Bruxelles même, moi j'étais derrière le ministre, Charbonnel m' a dit "Est-ce qu'il y a des choses que les anglais peuvent faire" J'ai dit oui, on avait un dossier tout prêt. Il m'a dit "Allez en parler avec Heseltine parce que moi, je ne veux pas lui parler" Alors ça, ça a joué un rôle un peu négatif.
GA : J'ai donc été pendant un an, secrétaire général de la conférence commune et puis je suis parti.
AL: C'est Messmer qui s'est opposé à votre nomination à la direction générale de l'ESA ?
GA : Ah oui, je n'étais pas très chaud , je vous dirais, pour être patron de l'ESA. je m'étais dit: quand même, puisque je ne veux pas avoir l'air de terminer par un échec, je vais y aller. Et alors tout le monde était d'accord sauf Messmer qui était à ce moment là Premier ministre qui a dit non, non. c'est son droit. Il n'a pas voulu , il n'a pas voulu, hein. Il avait proposé Chevallier; Je ne sais pas pourquoi ça n'a pas marché.
AL: Je crois que le ministre des Armées s'y est opposé.
GA: Oui et pourquoi il ne voulait pas de Chevallier ?
AL: Parce qu'il ne voulait pas lâcher Chevallier. Ce n'était pas qu'il ne voulait pas de Chevallier à la tête de l'ESA, c'est qu'il ne voulait pas lâcher Chevallier.
GA: Il y a eu Blassel aussi qui était candidat et puis il y a eu aussi l'allemand qui était bien en cour lui: il avait été maire de Bonn: lui aussi était candidat et puis en définitive ça été tout bêtement l'anglais. C'est bizarre.
AL: Roy Gibson qui était le directeur administratif de l'ESRO.
GA : Très bien d'ailleurs. Vous avez été à l'ESA vous avec lui. Ce n'était pas l'ESA ?
AL: Si, si c'était l'ESA. Je n'ai jamais été à l'ESRO. Je suis entré à l'ESA le jour de la signature de la convention...
l'Industrie Spatiale Européenne dans les années soixante
L'Industrie spatiale et les installations du CECLES-ELDO
EUROPE :
SPADEADAM : Bancs d'essais du Blue Streak
DERBY Coventry : Rolls-Royce (production des RZ-2)
STEVENAGE : Hawker Siddeley Dynamics (production des Blue Streak)
BREMEN : ERNO (production étage Astris)
TRAUEN : ERNO 1} Bancs d'essais d'Astris
LAMPOLDSHAUSEN : DFVLR)
OTTOBRUNN : Bölkow (production de composants pour Astris)
REDU : Station de réception Belgique
TURIN : Fiat (production des coiffes Europa pour Astris)
VERNON : LRBA (production propulsion Coralie)
LES MUREAUX : Nord Aviation (production des réservoirs de Coralie)
VILLAROCHE : SEPR (conception du moteur principal d'Astris)
BISCAROSSE : CEL (essais en vol Cora)
AFRIQUE :
HAMMAGUIR : CIEES (essais en vol Cora)
AUSTRALIE :
GOVE : Station de guidage radio d'Europa 1
WOOMERA : WRE ( base de lancement Europa 1)
AMERIQUE DU SUD :
KOUROU : CSG (base de lancement Europa 2)
transport de Blue Streak sur le site C3
banc statique d'essais C3 à Spadeadam
production du Blue Streak à Stevenage en Angleterre
Stevenage HSD Production des étages Blue Streak
usine de De Havilland à Stevenage en Angleterre
étages Blue Streak en phase finale d'assemblage à Stevenage en mars 1969
Usine de Stevenage réservoir du Blue Streak chez Hawker siddeley
tests de la résistance aux vibrations de la fusée Europa 1 dans la tour à Hatfield en angleterre chez Hawker Siddeley dynamics en Août 1964
test des moteurs Rolls Royce de Blue Streak dans la tour de Hatfield en 1966
Derby Coventry: fabrication du moteur RZ-2 de ROLLS-ROYCE
turbo pompes du moteur RZ2
dans le Cumberland à Spadeadam le Rocket test establishment géré par Rolls Royce
usine des Mureaux Nord Aviation fabrication du 2éme étage Coralie
usine de Nord Aviation aux Mureaux France
A Villaroche en France essai du moteur de la SEPR (Astris)
Ottobrünn (RFA) : janvier 1966 production des composants du premier exemplaire d'Astris pour le tir F4
A Trauen en RFA essai d'Astris sur banc d'essais D en juillet 1968
En 1965 Au L.R.B.A : dans la forêt de Vernon le banc d'essais PF4 pour les moteurs de Coralie
Vernon au L.R.B.A le point fixe PF4 a été mis en service en 1963
7 la reconstitution d'un engin CORA
A la fin de l'année 1988, la SEP décida d'utiliser un survivant qui reposait depuis des lustres dans un hangar. Il s'agissait d' un étage Coralie en configuration sol qui fut vraisemblablement utilisé lors des essais au banc de cet étage et qui servit ensuite d'engin d'exposition.Il fut alors décidé de le restaurer et de l'exposer à l'intérieur de l'Etablissement de Vernon de la SEP, et ce en configuration CORA complète.
Cette décision impliquait la reconstitution de l'Astris et de la coiffe, ainsi que des empennages. La SEP ne disposant que de peu d'informations relatives à Astris et à la coiffe, l'on contacta les contractants de l'epoque. Tant ERNO qu'Aéritalia ( ex FIAT) collaborèrent fort aimablement et nous fournirent la documentation nécessaire.Seules les empennages durent être reconstitués d'après les photos de l'époque, fournies par le CEL de Biscarosse. L'Equipe SEP responsable des restaurations contacta alors la Société ETUMECA qui se chargea de la reconstitution de l'engin, sur plans retracés par la SEP.Parallèlement à la reconstitution, l'on s'affairait à retrouver des photos couleurs permettant une mise en peinture réaliste de l'engin.Ce fut fait grâce à l'aide du CEL. C' est alors que l'on décida de remplacer la tôle ondulée très spéciale d'Astris par des bandes de peinture alternativement gris clair et gris foncé en raison de l'indisponibilité d'une tôle ondulée conforme à la liasse. Pendant ce temps, les architectes de la SEP avaient étudié et fait réaliser le massif en béton permettant de l'exposer de manière stable. La société SOS sablage fut alors chargée de la mise en peinture et enfin CORA put revenir à Vernon. Le grand jour arriva le 9 mars 1989 . A 13 heures un semi remorque se présenta à la porte de la SEP, il transportait CORA. Après des heures d'efforts, une grue posa délicatement CORA sur son socle, où elle trône désormais , témoin d'un passé finalement encore proche.
CORA reconstruite avant peinture
CORA reconstruite après peinture
mise en place de la CORA reconstruite sur son socle à la SEP le 9 mars 1989 ( photos SEP)
REMERCIEMENTS
Nous tenons à remercier toutes celles et tous ceux qui nous ont permis de reconstruire CORA et de relater son histoire et celle d'EUROPA.
M. LUCAS de l'Aérospatiale (Les Mureaux)
M. HAMMER
et Mme OTTEMEYER de MBB-ERNO (Brême)
M. LICCI
et Mme BOCCUTI d'Aéritalia (Turin)
M. NOIR du CNES (Evry)
M. RÔSSLE du Conseil de l'Europe (Strasbourg)
M. HUMBY de British Aerospace (Stevenage)
M. JOLLEY du DSTO (Salisbury, Australie)
M. MACH de MBB (Ottobrunn)
M. EVANS de Rolls-Royce (Derby)
Le Centre d'Essais des Landes
de très nombreuses personnes de la SEP ainsi que les sociétés
ETUMECA (27430 Muids), S.O.S. Sablage (76350 Oissel), Pinson Villatte
Top Levage , et AGEA (27200 Vernon) qui ont permis de concrétiser ce projet.